jeudi 4 juillet 2013

Pérou/Mexique, le travail des enfants et maltraitances

Les enfants domestiques 
sont exposés 
à de nombreux abus


Par Aline Timbert

Ce sont environ 110 000 enfants et adolescents qui réalisent au Pérou des travaux domestiques, des tâches susceptibles de les éloigner du système scolaire et de les exposer à différents dangers, c’est le message d’alerte diffusée par la fondation Terre des hommes. Le monde compte plus de 100 millions d’enfants travailleurs, la majorité est exploitée par des familles. Ils sont la plupart du temps très mal payés ou bien ne perçoivent aucune rémunération, et leurs conditions de travail dépendent entièrement du bon vouloir de l’employeur. Ils ont très souvent une lourde charge de travail : ils font les courses, la lessive, la cuisine, le ménage et ils peuvent également s’occuper des enfants du foyer.

Un rapport de l’OIT et du Programme international pour l’éradication du travail infantile émis en 2002 (International Programme on the Elimination of Child Labour – Ipec) fait mention de près de 2 millions d’enfants domestiques, principalement des fillettes et adolescentes travaillant en Amérique Latine et en zone caraïbe.  

En Amérique du Sud, le Pérou et le Brésil sont les pays qui présentent les pires chiffres relatifs au nombre d’enfants domestiques, malgré les efforts fournis ces dernières années par les autorités.

« 62 % des adolescents âgés de 14 à 17 ans présentent, en moyenne, un retard scolaire de deux ou quatre ans », a souligné la représentante de l’organisation, Carmen Montes. La fondation se base sur des chiffres émis par l’Organisation internationale du travail qui a lancé la campagne « chez moi il n’y a pas de travail infantile domestique » dont l’objectif est de faire en sorte que la société reconnaisse cette situation comme un véritable fléau social. 

L’OIT affiche clairement sa volonté de sensibiliser le public sur les risques encourus par les mineurs contraints de travailler, mettre cette triste réalité dans la lumière pour y mettre fin.

« 65 % des travailleurs infantiles domestiques de Lima [capitale du Pérou] sont des migrants, la modalité principale est celle du ‘gîte et couvert’  », une situation qui génère le plus grand risque d’exploitation, logés au domicile de ceux qui les emploient et loin de leurs familles, les enfants domestiques se retrouvent dans une situation de totale dépendance.
 
Les jeunes travailleurs issus essentiellement des zones rurales les plus pauvres (le travail infantile est une conséquence directe de l’exclusion sociale) sont fréquemment soumis à de longues journées de labeur (dans le pire des cas, « ils peuvent être exploités jusqu’à 16 ou 18 heures par jour, ils peuvent être également soumis à des abus physiques, émotionnels et sexuels, sans compter les problèmes de retard ou de désertion scolaire », a indiqué la représentante.

Le travail infantile est synonyme de longues heures d’activités diverses, les enfants et adolescents ne peuvent donc pas suivre une scolarité normale ni même tisser des liens sociaux en adéquation avec leur âge ou s’épanouir par le jeu, ils sont également exposés au risque d’accident ou encore à différents types de lésions, il faut également citer le risque de harcèlement sexuel. 

Selon des renseignements fournis par l’Organisation internationale du travail, sur les 110 000 travailleurs domestiques âgés de moins de 18 ans, 79 % d’entre eux sont de jeunes filles et 74 % sont âgés de 12 à 17 ans et 26 % entre six et 11 ans. Être une petite fille, ou une adolescente issue d’une famille défavorisée des zones rurales ne fait qu’augmenter les risques d’exploitation !

Selon l’OIT, la pauvreté et l’empreinte culturelle sont des facteurs déterminants à l’origine de ce problème social « beaucoup pensent encore que le travail est formateur, que les enfants et adolescents seront meilleurs s’ils commencent à travailler très jeunes. Mais il est également vrai que les mauvaises conditions économiques peuvent expliquer l’expulsion des enfants du foyer familial ».  

La spécialiste souligne donc l’importance du secteur éducatif, ce dernier doit être attractif pour les adolescents, d’autre part il précise que les gouvernements locaux et régionaux doivent agir en faveur de la protection de l’enfance. Cette année l’OIT souhaite attirer l’attention sur ce type d’exploitation infantile, car cette activité est très enracinée dans de nombreux pays. On estime que 15,5 millions d’enfants et adolescents de moins de 18 ans travaillent comme domestiques.

Le travail infantile domestique ne constitue pas une aide, c’est de l’exploitation. Les mineurs n’étudient pas, ne jouent pas, sont exposés à différents dangers, au harcèlement sexuel, et sont contraints d’accomplir des journées de travail pouvant atteindre jusqu’à 18h.  

Pour l’OIT, l’éducation est l’un des principaux droits des enfants qui est mis à mal, en travaillant ainsi dès leur plus jeune âge, c’est également l’intégrité physique et émotionnelle des mineurs qui est clairement menacée (abus, maltraitance, brimades et discrimination).

Selon la loi péruvienne, aucun enfant n’est pas autorisé à travailler avant l’âge de 15 ans en accord avec la résolution 138 de l’OIT, à partir de 15 ans un adolescent est autorisé à exercer une activité à condition que les normes de sécurité, de moralité soient respectées et que sa santé ne soit pas mise en danger. Une législation souvent contredite par les faits.

Au Mexique, plus de 3 millions d’enfants âgés de 5 à 17 ans travaillent, employés dans les champs ou majoritairement comme domestiques, beaucoup d’entre eux ne vont pas l’école. 

Pour l’expert de l’Institut de recherche juridique de l’université nationale autonome de Mexico, quatre mineurs sur 10 travaillent sans recevoir la moindre rémunération, 60 % travaillent auprès d’un proche, 30 % d’entre eux sont employés dans le secteur agricole et 52 % dans le secteur des services et du commerce. 

Comme le précise Thomas Wissing, 1 929 161 mineurs ne sont pas scolarisés au Mexique. De nombreux enfants et adolescents travaillent comme domestiques ils sont soumis à des journées de travail à rallonge, sous fond d’humiliation, de violences physiques ou verbales et d’abus sexuels, des risques encore accrus lorsqu’ils sont logés au domicile même de leur employeur qui peut dès lors exercer des pressions sans la moindre contrainte.

L’OIT a créé la journée mondiale contre le travail infantile en 2002 (qui se tient le 12 juin) pour éveiller les consciences et promouvoir des actions qui condamnent la privation des droits élémentaires des enfants. L’année 2013 a été dédiée plus particulièrement au travail des enfants dans les milieux de la domesticité, ce qui concerne environ plus de 10 millions d’enfants sur la planète selon un dernier rapport de l’OIT.

Jean Zermatten, directeur de l’Institut des droits de l’enfant et vice-président du Comité ad hoc des Nations Unies, a déclaré « L’agriculture et le travail domestique constituent les deux principaux secteurs informels non protégés » ajoutant « Mais le travail domestique connaît souvent des situations plus graves, car il a lieu derrière une porte close et il permet de décharger une famille déjà très pauvre ».


Source : l'article et photos d'ACTU LATINO