mercredi 5 juin 2013

Mexique, l'état du Michoacán au main du crime organisé ?

Que se passe-t-il 
au Michoacán ?



Par J. Tadeo - Traduction de Celine Arnoldi

Le Président Enrique Peña Nieto a ordonné aux forces armées du Mexique d'entrer au Michoacán, pour rétablir l'ordre et réduire l'anarchie générale, dans un Etat assailli par le crime organisé, les milices [1] ou “gardes communautaires” formées pour le combattre, et le fanatisme religieux. Le Michoacán de Ocampo est l'un des 32 Etats qui forment les Etats-Unis du Mexique ; il comprend 113 communes, et se trouve dans le centre-ouest du pays. La crise du Michoacán et la réponse armée du gouvernement n'est pas nouvelle ; durant des années, le crime organisé a coûté la vie à des centaines de personnes.
 
José Gil Olmos commente la dernière campagne militaire lancée le 20 mai 2013 :

"L'obsession de Felipe Calderón de mettre fin à la violence au Michoacán par la voie militaire a été minutieusement transmise à son successeur à la Présidence. En un remède désespéré, Enrique Peña Nieto a reproduit le début de la guerre de Calderón : samedi 20 mai, il a envoyé plus de six-mille militaires et des centaines de policiers dans cet Etat. Au chaos et non-droit que les cartels de la drogue ont imposés, Peña Nieto répond par des mesures hâtives et commet ses premières erreurs tactiques."

Au cours du précédent mandat présidentiel de six ans de Felipe Calderón, diverses opérations ont été menées dans l'intention d'imposer l'ordre, mais beaucoup doutent qu'elles aient réussi.
 

Comme le journaliste Joaquín López-Dóriga qui écrit :

"Le Michoacán est-il mieux aujourd'hui qu'il y a six ans ? De mon point de vue, qui est sans importance, non. Mais du point de vue des centaines de milliers d'habitants du Michoacán, qui sont les seuls qui comptent, ils vont plus mal maintenant qu'avant, sans aucun doute du fait qu'en moins de six ans ils ont eu trois gouverneurs et d'un oubli passé du retour d'attention à l'abandon des régions.

Et bien que cela puisse offenser certaines personnes, nous devrons recommencer à conquérir l'Etat du Michoacán assurément failli, dans une situation qui si elle n'est pas réglée le transformera en Etat perdu."

L’Etat en déliquescence dont López-Dóriga qualifie le Michoacán s'ajoute à des remarques faites par le dirigeant de la principale force politique de gauche du Mexique, Jesús Zambrano, qui a récemment déclaré que “d'ici à 2015, le Michoacán pourrait être un narco-Etat, dans lequel le crime organisé pourrait s'emparer des 113 présidences de municipalités."

Le portail Nuklear évoque aussi la situation chaotique dans laquelle se trouve le Michoacán :

"Violence et danger règnent en maîtres dans l'Etat : manifestations permanentes d’élèves-instituteurs, attaques des groupes d'auto-défense et conflits du crime organisé. Le Michoacán a été défini comme la cible du crime organisé, mais l'insécurité s'est accentuée depuis que le gouverneur, Fausto Vallejo, a demandé un congé de trois mois pour s'occuper de ses problèmes de santé. Et malgré le secrétaire du gouvernement, Jesús Reyna, gouverneur par intérim, l'anarchie s'empare de l'Etat."

Un autre problème auquel l'Etat fait face est le fanatisme religieux, présent dans une communauté connue sous le nom de “Nouvelle Jerusalem”. Des incidents comme ceux relatés par Zayín Dáleth Villavicencio, où les adeptes du groupe religieux empêchent l'Etat d'offrir une éducation élémentaire aux enfants, sont devenus communs :

"Au prétexte d'avoir reçu un message de la Vierge du rosaire, depuis ce lundi matin, une centaine de personnes du mouvement religieux Nouvelle Jérusalem de la commune de Turicato au Michoacán ont bloqué le terrain sur lequel devaient être reconstruites des salles de classes maternelles, primaires et les bureaux de Telesecundaria [une chaîne mexicaine lancée pour développer l'éducation secondaire] détruits le 6 juillet dernier.

Avec cela, nouvelle alerte, les habitants ont occupé le terrain pour empêcher l'arrivée de matériel de construction, ils s'opposaient à une éducation laïque au sein et aux environs de la commune. C'est une situation qui a conduit à un conflit qui n'a pas été résolu durant près de cinq mois."

Sur Twitter, Jesús Robles Maloof (@roblesmaloof) a lancé une nouvelle polémique avec la découverte que le PAN (Parti action nationale) a mentionné qu'un retrait des pouvoirs locaux devrait être ordonné dans l'Etat en question : Au Sénat, PAN demandera le retrait des pouvoirs au #Michoacán Dans quel Etat Felipe Calderón avait débuté sa “guerre contre le crime” ?

Juan Carlos Pueblita (@jcpueblita) au Michoacán faisait le commentaire suivant au sujet de cette “nouvelle” stratégie pour la reconquête du Michoacán : Les mesures d'endiguement militaire au #Michoacán ne sont que ça, un endiguement. La vraie solution est d'améliorer son gouvernement

Et afin de mieux comprendre la situation actuelle dans la “Nouvelle Jérusalem”, l'utilisateur elissarima (@tlanemani_tlan) a partagé la photographie suivante des restrictions pour accéder à l'école contrôlée par le groupe religieux :


Les règles de l'école nouvelle Jérusalem, au Michoacán. Photo partagée par @tlanemani_tlan sur Twitter. 

Attention. L'entrée de femmes avec jupes courtes ou décolletés, sans manches, portant des pantalons, du maquillage, du vernis à ongles ou une tête non couverte est interdit. Ainsi qu'aux hommes à cheveux longs ou vêtus de manière indécente.

 

L'ordre sera-t-il rétabli au Michoacán ? L'Etat garantira-t-il les droits fondamentaux des personnes du Michoacán, parmi lesquels celui à l'éducation ? Militariser la zone est-elle la meilleure option pour réduire la violence ? Seul le temps le dira. En attendant, les familles victimes d'extorsion et menacées d'exécutions ne peuvent attendre plus longtemps que la paix revienne dans cet Etat démuni.
 
Note :

[1] En l'absence de forces de l'ordre dans divers Etats assaillis par le crime organisé, la population civile s'est organisée elle-même pour prendre les armes afin de protéger leurs familles et se faire justice eux-mêmes. Ces groupes ont différents noms tels que “groupes d'auto-défense”, “police” ou “garde communautaire”, etc.. Mais il est à craindre que certains de ces groupes informels soient soutenus par le crime organisé lui-même, ou pire encore, par des organisations de guérilla. Guerrero, Chiapas et Michoacán font partie des Etats dans lesquels ces groupes se cachent régulièrement le visage pour éviter d'être reconnus.



Source : Global Voices