mardi 12 février 2013

Livre, Les Amérindiens à la reconquête de leur destin

La grande revanche: 
les Amérindiens 
à la reconquête de leur destin


Jean-Baptiste Mouttet et Julie Pacorel, 
Editions Autrement.


 Par Raoni, traduction de Solène Tricaud
 
Le cacique Raoni, grand chef amazonien du Brésil, a fait connaître la lutte des siens pour la sauvegarde de la forêt et de leur territoire dans le monde entier. Aujourd’hui âgé de 80 ans, il milite activement contre la construction d’un ensemble de barrages sur les terres de son peuple, les Kayapo, dans la région du Mato Grosso au Brésil.
 
Avant propos du livre La Grande revanche des Amérindiens
Depuis mon enfance, je lutte pour la survie de mon peuple, pour le territoire, pour les fleuves. Mon père m’a donné les premières instructions et orientations pour préser- ver les intérêts des miens. Dans les années 1950, j’ai rencon- tré le Blanc, l’explorateur Orlando Villas-Bôas, le fondateur du parc national du Haut-Xingu. Lui aussi m’a donné beau- coup de conseils pour la sauvegarde de notre culture.
 
Nous sommes actuellement en conflit avec de grands propriétaires qui convoitent nos terres et nos fleuves pour y installer une usine hydroélectrique. Nous faisons tout pour empêcher sa construction sur notre territoire, Kapot Nhinore. 

Le gouvernement brésilien procède actuellement à la démarcation (la délimitation en vue de la protection) de cette terre, mais cela ne suffit pas. Les investisseurs nous persécutent, un camion de la Fondation nationale de l’Indien a d’ailleurs récemment été brûlé. Cela ne devrait pas arriver au Brésil, ni dans aucun autre pays où vivent des peuples indigènes. Nous devons être respectés.
 
Le gouvernement ne fait pas assez pour notre survie. Il laisse la possibilité à des personnes de construire des barrages sur nos fleuves. Ces projets engendrent la destruction des forêts. Le fleuve Xingu doit rester intact, sans usine, car des hommes et des femmes y habitent. Nous avons besoin de ce fleuve pour nous alimenter et pour survivre. J’espère ren- contrer rapidement les autorités à Rio de Janeiro pour leur parler de ceci, de la conservation des forêts et des fleuves.

Pour cela, j’ai besoin de l’appui des miens et des célébri- tés rencontrées au cours de mes voyages. J’ai créé l’Institut Raoni pour faire se rencontrer et mobiliser l’ensemble des peuples indigènes d’Amérique du Sud, en espérant recevoir des soutiens de la part d’un maximum de personnes. 

L’union des peuples indiens est le chemin qui pourrait résoudre beau- coup de nos problèmes. Ces dernières années, lors de mes voyages à l’étranger, on ne me parlait que de cela. Cet institut doit être une vitrine de la lutte pour mon peuple, pour les forêts et les fleuves. 

J’espère également que l’accession de certains indigènes à la tête d’États d’Amérique du Sud permettra de mieux agir en faveur de nos peuples. Cependant, une de mes craintes est de voir mon combat récupéré ou utilisé à des fins personnelles par des gens mal intentionnés.
 
Au-delà de la préservation de nos terres, je suis également très inquiet du fait que notre culture puisse être dévalorisée face à la culture des non-indigènes. La façon de se vêtir, la langue portugaise et la consommation de boissons alcoo- lisées me préoccupent beaucoup. Si nos jeunes s’engagent dans cette direction, j’ai peur que la culture mebêngôkre (l’autre nom donné aux Kayapo) disparaisse. 

Aujourd’hui, certains indigènes travaillent en ville et cela me préoccupe pour les générations futures. Vont-elles maintenir notre culture ou adopter peu à peu la culture du non-indigène ? 

Continueront-elles à être indigènes ? Je pousse les jeunes à encourager les enfants à être plus indigènes, à maintenir les traditions et le mode de vie, de survie, dans les villages, pas dans les villes. Ils sont l’avenir, ils doivent défendre notre culture.

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